Grande ortie
NOM LATIN : Urtica dioica
FAMILLE : Urticaceae
Description du Genre - FLORE de l'abbé Hippolyte Coste
Genre 645. - URTICA L.
(Du latin urere, brûler : allusion aux piqûres brûlantes des poils.)
Fleurs monoïques ou dioïques. Mâles : périanthe à 4 à 8 divisions; 4 ou 5 étamines, à filets longs, repliés, élastiques; anthères arrondies, fixées par le dos. Femelles : périanthe à 4 divisions très inégales, les 2 extérieures petites ou nulles ; style presque nul, stigmate en pinceau ; fruit ovoïde-comprimé, renfermé dans le périanthe.
Fleurs vertes, en grappes ou glomérules axillaires et terminaux; feuilles opposées, pétiolées, fortement dentées ou incisées, à stipules libres; plantes hérissées de poils raides sécrétant un liquide très irritant.
Environ 30 espèces habitant les régions tempérées de tout le globe. Les jeunes pousses sont comestibles, les tiges fibreuses et utilisées pour faire des cordes, les graines recherchées par la volaille.
Description de l'espèce - FLORE de l'abbé Hippolyte Coste
3257. - U. dioica L. Grande Ortie.
Plante vivace de 80 cm. à 1 mètre, d'un vert sombre, hispide, à souche rampante ; tiges robustes, dressées, simples ; feuilles grandes, ovales-acuminées, un peu en cœur à la base, dentées, à grosses dents ovales-triangulaires ;
pétiole 1 à 2 fois plus court que le limbe, à 2 stipules linéaires-lancéolées ; fleurs dioïques, parfois monoïques, en grappes rameuses bien plus longues que le pétiole, les fructifères pendantes ; périanthe pubescent.
Varie à plante densément hispide, dents foliaires profondes (U. HISPIDA DC) .
Lieux incultes, dans toute la France et la Corse.
Régions tempérées de presque tout le globe.
= Juin à octobre.
FLORE de Otto Wilhelm Thomé (1895)
Histoire des plantes de l'Europe - Tome 4 - J. L. M. POIRET - 1827
ORTIE. (Urtica, Linn.)
Les orties, si bien connues par leurs piqûres
brûlantes forment un genre nombreux en espèces très-peu appartiennent à l'Europe. Leurs
fleurs sont monoïques, quelquefois dioïques privées de corolle. Les mâles sont pourvues d'un
calice à quatre divisions profondes, de quatre
étamines, dont les filaments courbés avant la floraison, se redressent avec élasticité. Dans les
fleurs femelles, le calice est à deux valves l'ovaire
surmonté d'un stigmate velu il lui succède une
semence recouverte par le calice. Les feuilles sont
opposées.
Les orties se rendent redoutables par les poils nombreux dont elles sont hérissées. La base de
ces poils est un tubercule glanduleux d'où suinte
une liqueur caustique lorsqu'ils pénètrent dans
la peau, le fluide des glandes les traverse, s'insinue dans la plaie, y excite une cuisson brûlante.
L'homme que bien souvent l'expérience conduit
à convertir en remèdes les poisons les plus violents, a su également profiter de l'irritation des
piqûres de l'ortie, dans plusieurs cas, tels que
dans les rhumatismes chroniques, dans les accidents de la répercussion de certaines maladies
cutanées, dans différentes espèces de paralysies,
et dans certaines affections comateuses.
Dans l'économie domestique, on retire de l'ortie
plusieurs services avantageux. La substance filamenteuse que produisent ses tiges, soumise à
l'opération du rouissage, procure une excellente
filasse avec laquelle on peut fabriquer des cordes,
des toiles, des filets, etc., à la vérité un peu inférieurs en finesse et en force aux toiles de
chanvre. Elle est en usage depuis long-temps chez
les Baskirs les Kamtschadales, et autres peuples
du Nord. On peut encore employer la filasse à
la fabrication du papier.
Les orties cuites et apprêtées comme des épinards, lorsqu'elles sont jeunes et tendres, offrent
un aliment assez agréable, mais peu substantiel.
Elles sont recherchées par tous les animaux domestiques, surtout par les vaches; elles augmentent la quantité et la qualité de leur lait: mais
ces animaux dédaignent les orties trop récentes,
dont elles craignent les piqûres. Il suffit alors de
les laisser faner pendant quelques heures, pour
éviter cet inconvénient. Comme l'ortie pousse au
printemps, un mois avant la luzerne, elle deviendrait pour les bestiaux une ressource précieuse,
si elle était, comme on le fait en Suède, cultivée
en grand. Au reste, si le cultivateur craint de
substituer l'ortie à des plantes plus profitables,
qui l'empêche de chercher à la multiplier au milieu des décombres, dans les sols stériles, abandonnés, tandis qu'il la chasse avec raison des
terres cultivées dont elle ne tarderait pas de
s'emparer sans une surveillance particulière?
L'ortie fraîche, cuite et réduite en pâte, est encore
employée avec avantage pour la nourriture de la
volaille: elle est même réservée, dans plusieurs
contrées, pour la nourriture des jeunes dindons.
L'ortie est connue depuis très-long-temps. Les
Grecs lui donnaient le nom d'acalypha; les Latins
celui d'urtica, composé des mots urere (brûler),
tactus (toucher),qui brûle quand on y touche.
Cette plante était, chez les Romains, au nombre des
mets que l'on servait sur les tables frugales, comme
on le voit dans un passage d'Horace relatif à la
sobriété.
Perse en a parlé dans le même sens, mais ironiquement. Juvénal, en comparant
l'ortie à des aiguillons propres à exciter les passions, se plaint au dieu Mars d'en avoir frappé
les Romains, ses descendants.
L'ORTIE dioïque ( urtica dioica Linn. ) est facile à distinguer de la suivante par ses feuilles
plus grandes, d'un vert sombre, échancrées en
coeur à leur base, aiguës, dentées en scie. Les
fleurs sont dioïques; les grappes linéaires, ramifiées, souvent géminées dans chaque aisselle des
feuilles. Les semences sont luisantes, renfermées
entre les deux valves du calice, accompagnées de
deux autres très-petites, opposées.
Cette plante croît partout eu Europe, dans les contrées du
Midi comme dans celles du Nord, jusque dans la
Laponie, sur le bord des chemins et des haies,
dans les champs, les jardins, etc. Elle fleurit dans
l'été, ainsi que les suivantes. Cette espèce est préférée pour les usages indiqués plus haut. Les gens
du peuple se servent de sa racine bouillie dans
l'eau, pour teindre les oeufs en jaune. Ses feuilles
nourrissent de très-beaux papillons, tels que le
papilio urticaria, oculus pavonis, belladona, sevana, Linn. etc. Beaucoup d'autres insectes, le
cimex tripustulatus aphis urticata, chermes urticoe, musca quinque punctata, Linn., etc.
FLORE MEDICALE - Tome 5 - MM. CHAUMETON, POIRET, CHAMBERET - 1834
Français : ORTIE; GRANDEORTIE; ORTIEDIOÏQUE
Italien : ORTICA MAGGIORE.
Espagnol : ORTIGA MAYOR.
Portugais : ORTIGA MAIOR.
Allemand : GROSSE BRENNESSEL.
Anglais : COMMON KETTLE.
Hollandais : GROOTE BRANDENETEL.
Danois : STOR BROENDENELDE.
Suédois : BRAENNAETSLA.
Polonais : POKRZYWA.
Russe : KROPIWA SCHIKOWICA.
Tatar : KETSCHERKAN.
Bashir : KETSKAN.
Kirgis : KIRTKEN.
Finlandais : NOCKAINEN.
Chacun connaît l'ortie. Ses piqûres cuisantes, son peu d'éclat, ses dehors rustiques, son séjour parmi les décombres,
aux lieux incultes et abandonnés , la font repousser avec dédain toutes les fois qu'elle se présente dans nos possessions. Sans les
soins constans que l'on met à la détruire, elle les aurait bientôt envahies au détriment des plantes que nous y cultivons :
elle a cependant, sous le rapport de l'économie, des propriétés qui pourraient lui attirer la préférence sur beaucoup d'autres
plantes dont le mérite ne consiste que dans l'éclat séduisant de leurs fleurs. Celles de l'ortie sont monoïques,
quelquefois dioïques.
Les fleurs mâles naissent en grappes, sans corolle. Leur calice est à quatre divisions : il renferme quatre étamines dont
les filamens sont courbés avant la floraison; un corps glanduleux remplace le pistil.
Les fleurs femelles sont, ou en grappes, ou réunies en tètes
spheriques ; leur calice composé de quatre folioles inégales ;
un ovaire supérieur, surmonté par un stigmate veluetsessile;
une seule semence enveloppée par les deux folioles alongées du calice persistant.
L'ortie dioïque a ses tiges hautes de trois pieds et plus, droites, rameuses, quadrangulaires, hérissées, ainsi que toutes
les autres parties de la plante, de poils, dont la base est un
tubercule glanduleux.
Les feuilles sont opposées, petiolées , d'un vert sombre,
ovales, en cœur, aiguës, dentées à leurs bords, accompagnées
de très-petites stipules.
Les fleurs sont disposées en grappes longues , pendantes , un
peu rameuses, souvent géminées dans chaque aisselle, d'un
Vert blanchâtre; les fleurs mâles, séparées des femelles sur
des pieds différens.
Dans l'ortie piquante, les fleurs sont monoïques ; les grappes sessiles, plus épaisses; les feuilles ovales,
non échancrées en cœur. Les chatons des fleurs femelles sont
globuleux dans l'urtica pilulifera.
L'odeur et la saveur de cette plante sont simplement herbacées. Sa racine seule présente, dans l'état frais, une légère
amertume, mais cette dernière partie est inusitée ainsi que les
semences. La texture de son écorce, qui permet d'en retirer
des fils propres à divers usages économiques, et la piqûre vive
et brûlante que ses feuilles, dans l'état frais, déterminent sur
la peau, sont les seuls faits qui la rendent reeommandable.
Les petits poils roides, minces et aigus, dont les feuilles
sont hérissées, sur toutes leurs faces, adhèrent à une petite
vésicule remplie d'un suc âçre et irritant. Lorsque la pointe
de ce petit aiguillon pénètre dans la peau, la résistance qu'il
éprouve fait subir à la vésicule qui lui sert de base, une pression
en vertu de laquelle le fluide qu'elle contient traverse le petit
aiguillon qui l'insinue ainsi dans la plaie pratiquée à la peau.
De là , la cuisson brûlante , la douleur et la formation de petites papules, dont l'éruption suit constamment la piqûre de
l'ortie. C'est en vertu de cette vive irritation que les feuilles
de cette plante déterminent sur la peau, que l'urtication ou l'action de frapper une partie avec des orties vertes, a été mise en
usage dans le traitement de différentes maladies, soit pour exciter directement la peau, soit pour agir sur les tissus sous-
jacens, soit enfin pour agir consécutivement sur le système
nerveux.
C'est ainsi que l'urtication a été recommandée contre les accidens de la répercussion de certaines maladies cutanées
et contre les rhumatismes chroniques. On en a spécialement fait
usage, et souvent avec un grand succès, dans différentes espèces de paralysies et dans certaines affections comateuses.
Cette pratique, déjà connue des anciens, a été particulièrement recommandée par Celse et Aretée, et une foule de faits
constates par les modernes en ont confirmé les avantages.
On s'est également servi de l'urtication pour favoriser le développement de la sensibilité et l'abord du sang dans les organes génitaux
flétris par l'ubus des jouissances. Mais si des êtres avilis
et corrompus ont pu tirer parti de l'urticalion pour faire disparaître momentanément les signes d'une honteuse impuissance,
des accidens très-graves en ont souvent été le résultat.
L'ortie, administrée intérieurement, est loin de présenter les
avantages que l'on retire de son action irritante à l'extérieur.
Les effets qu'on a voulu lui attribuer, dans le premier cas, ne
reposent que sur de vaines hypothèses ou sur des opinions
éronées, et a l'exemple de Cullen, de Peyrilhe, d'Alibert et
de plusieurs autres, on peut, sans inconvénient, l'exclure de
la liste des médicamens. Toutefois, elle a été préconisée contre
les hémorragies : Amatus Lusitanus, Lazerme , Scopoli, ont
particulièrement vanté ses succès contre l'hémoptysie, Peyroux
et Lange contre ]a ménorrhagie; on a même prétendu que sa
vertu antihémorragique se transmettait au lait des vaches qui
s'en nourrissent, et qu'on avait ainsi un remède efficace contre
ces affections. Mais quelle confiance peut-on accorder au lait
des animaux nourris d'ortie, lorsque les propriétés de l'ortie
elle-même ne reposent sur aucune observation précise; et cependant l'ancienne renommée de cette plante herbacée est
passée des vieilles compilations de matière médicale, dans
l'esprit des commères les plus ignorantes, qui l'administrent
de toutes parts, à tort et a travers, et non sans dangers, aux
femmes qui ont des hémorragies utérines.
La racine et les semences , en décoction dans le lait, ont été
annoncées en Allemagne comme un excellent anthelmintique.
L'expérience n'a point encore prononcé sur ce fait.
La substance filamenteuse qu'on retire des tiges de l'ortie préalablement soumise à l'opération du rouissage, fournit
un fil qu'on peut employer à toutes sortes d'ouvrages. Les
Baskirs, les Kamchadales et autres peuples du nord en connaissent même dès longtemps l'usage,
et l'emploient à la fabrication des cordes, des toiles et des filets dont ils se servent
pour la pêche. Cet usage économique de l'ortie paraît même
avoir pas été inconnu aux anciens, et il serait bien important de ne pas le laisser tomber en désuétude. Quelques essais
faits en France ont prouvé qu'on pouvait en fabriquer de
bonne toile; il faudrait les répéter et les multiplier. De même
que les autres plantes oléracées, l'ortie jeune et tendre est employée dans nos cuisines comme aliment. Murray observe
qu'elle est sans inconvénient, mais qu'en grande quantité elle
est laxative, ce qui lui est commun avec la laitue, les épinards et autres végétaux très-estimés. On l'emploie, dans l'état
frais, à la nourriture des vaches, et après la dessiccation, elle peut être mêlée avec avantage au fourragé des bestiaux; ou
dit même qu'elle rend le lait des ruminans plus butireux, ce
qui mérite confirmation. Cette plante, fraîche, cuite et réduite
en pâte, est employée avec avantage à la nourriture de la volaille.
Dans quelques provinces, elle est même exclusivement réservée dans cet état à la nourriture des jeunes dindons. D'après
Hagstrom, Murray attribue à l'ortie, plantée autour des ruches,
la propriété de chasser les grenouilles dont le voisinage est, dit-on , un obstacle à la sortie des essaims d'abeilles.
La décoction de celte plante a donné, en très-peu de temps, la mort à
une grenouille qui y avait été plongée, ce qui annonce en
elle une action délétère sur cette espèce de batraciens.
EXPLICATION DE LA PLANCHE.
1 . Feuille inférieure, au trait.
2 . Fleur mâle de grandeur naturelle.
3 . Fleur femelle de grandeur naturelle.
4. Fleur mâle, grossie.
5 . Etamine grossie.
6. Fleur femelle, grossie.
7. Fruit mûr accompagné du calice persistaut.
8. Fruit dépouillé du calice.