Fraisier des bois
NOM LATIN : Fragaria vesca
FAMILLE : Rosaceae
Description du Genre - FLORE de l'abbé Hippolyte Coste
Genre 203. - FRAGARIA L. - Fraisier.
(Du latin "fragrans", odorant : allusion au parfum du fruit.)
Calice persistant, à 10 lobes sur 2 rangs, les 5 extérieurs plus petits en calicule; 5 pétales, largement obovales ; étamines nombreuses; styles latéraux, courts, marcescents; fruit bacciforme, formé de nombreux carpelles secs, lisses, disposés sur un réceptacle ovoïde ou globuleux, charnu-succulent, odorant et caduc à la maturité.
Fleurs blanches ou un peu rosées, en cymes terminales peu fournies; pédicelles fructifères recourbés; tiges et pétioles couverts de poils étalés; feuilles à 3 folioles dentées tout autour; stipules soudées au pétiole;
plantes vivaces, stolonifères.
5 ou 6 espèces habitant tout l’hémisphère boréal et l’Amérique méridionale. Toutes sont cultivées pour leurs fruits ou fraises, dont les usages et les propriétés sont bien connus.
Les racines des fraisiers sont astringentes.
Description de l'espèce - FLORE de l'abbé Hippolyte Coste
1149 . - F. vesca L. Fraisier des bois.
Plante grêle, de 5 à 21 cm. ; stolons nombreux, allongés, munis d'une écaille dans l'intervalle des nœuds feuilles ; tiges dépassant peu ou point les feuilles, velues, nues ou portant 1 à 2 feuilles florales ; feuilles assez grandes, à 3 folioles ovales, pâles-pubescentes ou subsoyeuses en dessous, largement dentées, toutes ou les latérales sessiles ; pédicelles un peu épais, couverts de poils appliqués ; fleurs blanches, moyennes (12 à 15 mm. de diam.), très fertiles; calice fructifère étalé ou réfléchi ; fruit ovoïde ou globuleux, rouge, rarement blanc, plus large à la base, entièrement
garni de carpelles, non adhérent au calice.
Bois, haies, buissons, dans presque toute la France et en Corse.
Europe ; Asie ; Afrique septentrionale ; Amérique du Nord et du Sud.
= Avril à juin.
FLORE de Otto Wilhelm Thomé (1895)
FLORE MEDICALE - Tome 3 - MM. CHAUMETON, POIRET, CHAMBERET - 1830
Italien ......... FRAGARIA.
Espagnol ........ FRESA.
Français ........ FRAISIER.
Anglais ......... STRAWBERRY.
Allemands ....... ERDBEERKRAUT.
Hollandais ...... AARDBEZIEN-KRUID; AARDBEZIESTAM.
Suédois ......... JORDGUBBAB.; SMULTRON.
Polonais ........ POZIEMKA.
LE fraisier est une plante humble et rampante qui végète parmi les mousses, sur les coteaux boisés, qu'on regarderait à peine sans le parfum délicieux de ses fruits, qu'elle produit dans toute leur perfection sans le secours de l'art, et qu'elle met à notre disposition, sans que la main qui veut les cueillir soit arrêtée par le droit exclusif de propriété.
Il est étonnant que le fraisier ne soit cité ni par les botanistes des premiers siècles, ni par les anciens agriculteurs :
Pline ne fait que le nommer; les poètes n'en parlent que comme d'un fruit champêtre : nous avons depuis amplement réparé cet oubli injurieux. Ses fruits font les honneurs des meilleures tables, et les délices des repas champêtres.
Malgré les nombreuses variétés obtenues par la culture, le fraisier des bois est presque la seule espèce de son genre, très-voisin des potentilles; il n'en diffère essentiellement que par le réceptacle de ses semences, qui s'agrandit après la floraison, et devient pulpeux, succulent, coloré et caduc. Son calice est ouvert, à dix découpures, cinq alternes plus petites ; la corolle à cinq pétales; un grand nombre d'étamines insérées sur le calice; des styles nombreux.
Ses racines sont noirâtres et fibreuses; elles produisent des rejets ou coulans qui rampent sur terre et poussent de nouvelles racines.
De chaque noeud enraciné sortent des tiges grêles, velues, et des feuilles longuement pétiolées, composées de trois folioles ovales, presque soyeuses en dessous, profondément dentées.
Les fleurs sont blanches, pédonculées, terminales; les pétales arrondis; le fruit est une sorte de baie pulpeuse.
Le fraisier est inodore, sa racine est légèrement styptique dans l'état frais, et devient un peu amère par la dessiccation. Les feuilles ont un goût herbacé légèrement austère. Les fruits remarquables par leur forme globuleuse, leur belle couleur rouge, leur odeur fragrante très-suave, et par une saveur aromatique, douce, acidulée, extrêmement agréable, flattent à la fois, selon l'expression de M. Chaumeton, la vue, le goût et l'odorat. Cette odeur suave des fraises est cependant nuisible à certaines personnes : mais il en est de ce phénomène particulier comme des éruptions variées, de diverses inflammations locales et de certaines fièvres passagères que ce fruit délicieux produit dans quelques cas rares ; accidens insolites qu'il faut attribuer à l'idiosyncrasie de quelques sujets, et dont on ne doit point accuser un fruit éminemment salubre.
La chimie ne s'est point encore convenablement occupée de l'analyse du fraisier. Ses racines et ses feuilles contiennent cependant du tannin, dont la présence est indiquée par la couleur noire que le sulfate de fer détermine dans leur décoction. Quant aux fraises, le plus simple examen suffit pour y constater la présence d'un principe
aromatique qui passe avec l'eau distillée, d'une grande quantité de sucre et de mucilage, et d'un peu d'acide.
Les racines et les feuilles de cette plante ont été préconisées comme apéritives, diurétiques, désobstruantes, etc. D'après l'idée vague qu'on attachait à ces expressions, on s'en est longtemps servi dans la jaunisse, contre les maladies des voies urinairés et pour combattre les obstructions. Au rapport de Spielmann, Nebel a fait
usage des feuilles pilées dans le traitement des ulcères. Toutefois, la propriété astringente d'où dérivent toutes les vertus dont on a décoré le fraisier, est trop peu développée dans cette rosacée, pour qu'on puisse la préférer à une foule de plantes de la même famille, beaucoup plus énergiques, et beaucoup plus propres, par conséquent, à produire la médication tonique avec astriction.
Quoique d'un caractère entièrement opposé, les qualités des baies du fraisier sont bien plus prononcées et bien plus utiles. Leur pulpe mucilagineuse, acide et sucrée, dissoute dans l'eau, forme une boisson parfumée, adoucissante, relâchante, tempérante, laxative; elle nourrit légèrement, apaise la soif, et convient dans presque toutes les maladies aiguës et dans un grand nombre de maladies chroniques. Cette boisson est recommandable surtout dans les fièvres inflammatoires, bilieuses et putrides, dans les embarras gastriques, dans le premier temps des catarrhes, dans les phlegmasies des vis-
cères, et dans les exanthèmes aigus. Elle jouit d'une réputation méritée dans les maladies de l'appareil urinaire : telles que la néphrite, la blennorrhagie. Elle n'est pas moins avantageuse dans les dartres, la phthisie pulmonaire et autres affections pathologiques accompagnées de chaleur, de soif, de sécheresse à la peau et de fréquence
du pouls.
Comme substance alimentaire, les fraises constituent un des alimens médicamenteux les plus utiles. Prises en grande quantité et pendant longtemps, elles sont susceptibles de produire, dans certaines maladies graves et rebelles, les changemens les plus favorables et les plus inattendus. Elles ont souvent guéri des affections qui avaient résisté à tous les moyens illusoires de la pharmacie.
Schulz a vu chez plusieurs sujets la fièvre hectique disparaître par leur usage. Van Swiéten atteste que la manie furieuse a souvent cédé à leur emploi alimentaire longtemps continué. Les observations de Gesner, confirmées par celles de Lobb, prouvent également que l'usage des fraises a été singulièrement utile à des calculeux. Plusieurs goutteux en ont fait longtemps avec succès leur principale nourriture, et l'illustre Linné parvint à se garantir des attaques douloureuses de l'arthritis par ce moyen. Hoffmann attribue même à l'ample usage des fraises la guérison de plusieurs phthisies pulmonaires qui, selon la remarque de M. Chaumeton, n'étaient probablement que des catarrhes bronchiques accompagnés de fièvre hectique. Que d'avantages ne retirerait-on pas de ces fruits dans le traitement du scorbut!
Toutefois en payant aux baies du fraisier le juste tribut d'éloges qu'elles méritent, doit-on leur accorder la faculté de dissoudre les concrétions tophacées qui se forment chez certains goutteux, autour des articulations? De ce que Lobb a vu des pierres extraites de la vessie se ramollir et diminuer de poids par une longue macération
dans le suc de fraises,doit-on en conclure que ces fruits analeptiques et rafraîchissans sont doués de la vertu lithontriptique? Sans doute l'impression relâchante qu'elles exercent sur nos organes les rend propres à calmer la douleur que détermine la présence d'un calcul.
En faisant cesser le spasme des uretères et du col de la vessie qui accompagne souvent la lithiasis, nul doute qu'elles ne puissent favoriser dans quelques cas l'expulsion des graviers d'acide urique qui se forment dans les reins; elles peuvent enfin, en augmentant la sécrétion de l'urine, prévenir la formation de ces calculs : mais ont-
elles la propriété de les dissoudre? C'est ce à quoi on peut répondre négativement.
Soit qu'on mange les fraises telles qu'elles se présentent dans la nature, soit qu'on les associe au sucre, avec un peu d'eau, de crème ou de vin, elles forment un aliment aussi agréable que salubre.
Toutefois, un tempérament éminemment lymphatique, une puissance digestive très-affaiblie, une température froide et humide, pourraient les rendre accidentellement peu salutaires, ou même en contre-indiquer l'emploi. La mollesse de leur pulpe ne permet pas de les conserver longtemps ; elles passent rapidement à la fermentation vineuse, et ensuite à la fermentation acéteuse.
Elles peuvent servir à la fabrication du vin et de l'alcool.
On emploie quelquefois les jeunes feuilles du fraisier en infusion théiforme. Les feuilles, ainsi que les racines, soit fraîches, soit sèches, entrent dans la composition d'un grand nombre de bouillons et d'apozèmes décorés du titre d'apéritifs.
Les fraises elles-mêmes fournissent à la pharmacie une eau distillée aromatique qui a été souvent employée dans des gargarismes et autres médicamens liquides. On en prépare un sirop très-agréablë, des glaces délicieuses et des sorbets d'excellent goût.
Histoire des plantes de l'Europe - Tome 6 - J. L. M. POIRET - 1829
Tandis que les arbres fruitiers étalent avec luxe leurs riches productions, le modeste fraisier, perdu, en quelque sorte, dans l'herbe et la mousse des montagnes et des bois, rivalise, par ses baies d'un goût exquis, d'un parfum délicieux, avec ces arbres qui enrichissent nos vergers, que nous ne devons qu'à l'industrie du cultivateur, au lieu que pour jouir des fruits du fraisier, l'homme n'a que la peine de les cueillir : la nature les lui fournit sans culture, et en grande abondance, surtout lorsque cette plante habite les lieux qui lui conviennent le mieux : elle fuit les pays chauds ; ce n'est pas sous un soleil brûlant qu'elle peut perfectionner son parfum. Quoiqu'elle soit descendue dans les plaines pour habiter les lieux couverts et les bois, sa véritable patrie est sur la pente des hautes montagnes, dans les forêts et sur la partie inférieure des Alpes.
C'est là qu'elle croît avec un tel luxe que, dans certains lieux, la terre en est toute couverte. Elle y fructifie depuis le printemps jusqu'en automne, tandis qu'ailleurs, comme dans les plaines des contrées tempérées, elle ne fleurit qu'une fois et
à une époque déterminée. Ajoutons que les fraises sont un bienfait que la nature offre à tous les hommes, sans que la main qui veut les cueillir soit arrêtée par le droit exclusif de propriété.
Voulons-nous, pour les avoir à notre disposition, les cultiver dans nos jardins? elles s'y multiplient avec facilité; mais on sait aussi que, par opposition avec les autres fruits cultivés, elles sont loin d'avoir le parfum des fraises de nos bois.
Il est étonnant que le fraisier ne soit cité ni par les botanistes des premiers siècles, ni par les anciens agriculteurs : Pline ne fait que le nommer ; les poètes n'en parlent que comme d'un fruit champêtre :
Qui legitis flores, et humi nascentia fragu,
Frigidus, o pueri fugite hinc, latet anguis in herbâ.
dit Virgile dans une de ses églogues.
Ovide, dans sa description de l'âge d'or, a dit également :
Ipsa tuis manibus, sylvestri nata sub umbrâ,
Mollia fragu leges....
Les fraises font aujourd'hui l'ornement des meilleures tables, et les délices des repas champêtres : elles flattent également la vue par leur forme globuleuse et leur belle couleur rouge;
l'odorat, par leur odeur fragrante, des plus suaves; le goût, par leur saveur douce, aromatique, acidulée. Soit qu'on mange les fraises telles qu'elles se présentent dans la nature, soit qu'on les associe au sucre avec un peu d'eau, de crème ou de vin, elles forment un aliment aussi agréable que salutaire. C'est en cueillant les fraises une à une, et les mangeant à mesure, qu'on goûte le mieux la finesse de leur parfum, surtout celles qu'on trouve sauvages au milieu des bois. La mollesse de leur pulpe ne permet pas de les conserver longtemps; elles passent rapidement à la fermentation vineuse, ensuite à la fermentation acéteuse, d'où il résulte qu'elles peuvent servir à la fabrication du vin et de l'alcohol. Leur suc exprimé, auquel on ajoute de l'eau et du sucre, fait une boisson agréable, très-rafraîchissante, propre à apaiser la soif, et qu'on peut employer avec avantage dans les maladies inflammatoires. Les limonadiers, les distillateurs, les confiseurs préparent, avec les fraises ou avec leur suc, des glaces, des liqueurs,
des pastilles, etc.
Prises en grande quantité et pendant longtemps, on assure qu'elles ont souvent produit, telles que dans les fièvres, les échauffements inflammatoires, et même dans la manie furieuse, les changements les plus favorables et les moins attendus. Linnée en fait le plus grand éloge.
Il paraît que le nom de ce genre, fragaria, vient du latin fragrans (odorant, qui sent bon).
Les fraisiers ont de très-grands rapports avec les potentilles. Ils n'en diffèrent essentiellement que par leur réceptacle très-grand, pulpeux, coloré, hémisphérique et caduc. Quoiqu'on ait obtenu par la culture un grand nombre de variétés de fraisiers, on n'en connaît cependant qu'une seule espèce en Europe, le FRAISIER DES BOIS (fragaria vesca, Linn.).
Sa racine est fibreuse; elle produit une souche écailleuse et des rejets qui se ramifient et contribuent à la multiplication de la plante.
Les feuilles sont presque radicales, composées de trois folioles ovales, presque soyeuses en dessous, fortement dentées ; les pédoncules sont longs; les fleurs blanches, terminales, pédonculées; les pétales arrondis. Après la floraison, le réceptacle s'agrandit, devient pulpeux, et porte le nom de fraises.