LES PLANTES SAUVAGES
Datura officinal - Stramoine - Herbe aux foux (Variété Tatula)

NOM LATIN : Datura stramonium var. tatula
FAMILLE : Solanaceae
Description du Genre - FLORE de l'abbé Hippolyte Coste
Genre 541. — DATURA L . — Stramoine.
(De tat, piquer, dont les Persans ont fait tatula et les Arabes datura.)
Calice longuement tubuleux, pentagonal, à 5 lobes, se rompant circulairement après la floraison un peu au-dessus de la base persistante et accrescente ; corolle en entonnoir, à tube très long, à limbe fortement plissé, à 8 lobes brusquement terminés en pointe courte ; 5 étamines incluses, à anthères linéaires s'ouvrant en long ; stigmate bilobé ; capsule grosse, épineuse, à 2 loges bipartites, s'ouvrant au sommet par 4 valves.
Fleurs blanches, rosées ou violacées, très grandes, axillaires, solitaires, pédonculées ; feuilles entières ou sinuées-dentées, pétiolées, les supérieures géminées;
plantes annuelles, robustes, à odeur vireuse.
Environ 12 espèces habitant les régions tempérées et chaudes de tout le globe.
Plantes vénéneuses, mais ornementales et souvent cultivées.
(De tat, piquer, dont les Persans ont fait tatula et les Arabes datura.)
Calice longuement tubuleux, pentagonal, à 5 lobes, se rompant circulairement après la floraison un peu au-dessus de la base persistante et accrescente ; corolle en entonnoir, à tube très long, à limbe fortement plissé, à 8 lobes brusquement terminés en pointe courte ; 5 étamines incluses, à anthères linéaires s'ouvrant en long ; stigmate bilobé ; capsule grosse, épineuse, à 2 loges bipartites, s'ouvrant au sommet par 4 valves.
Fleurs blanches, rosées ou violacées, très grandes, axillaires, solitaires, pédonculées ; feuilles entières ou sinuées-dentées, pétiolées, les supérieures géminées;
plantes annuelles, robustes, à odeur vireuse.
Environ 12 espèces habitant les régions tempérées et chaudes de tout le globe.
Plantes vénéneuses, mais ornementales et souvent cultivées.
Description de l'espèce - FLORE de l'abbé Hippolyte Coste
2631. — Datura Stramonium L . Pomme épineuse.
Plante annuelle de 40 cm. à 1 mètre, verte, glabrescente, à odeur vireuse; feuilles grandes, ovales-acuminées, fortement et inégalement sinuées-dentées à dents acuminées ; fleurs blanches, courtement pédonculées, longues de 6 - 10 cm. ; calice d'un vert pâle, long de 4 - 5 cm., égalant presque la moitié ou les 2/3 de la corolle, à lobes lancéolés-aigus ; capsule grosse comme une noix, dressée, ovale, chargée d'aiguillons robustes.
Varie à fleurs, tiges et nervures des feuilles violacées (D. TATULA L.).
Décombres, cultures, sables des rivières, ça et là dans presque toute la Franco et en Corse.
— Presque toute l'Europe, l'Asie, l'Afrique, l'Amérique.
= Juillet-octobre.
- Plante vénéneuse, préconisée contre l'asthme et les névralgies.
Plante annuelle de 40 cm. à 1 mètre, verte, glabrescente, à odeur vireuse; feuilles grandes, ovales-acuminées, fortement et inégalement sinuées-dentées à dents acuminées ; fleurs blanches, courtement pédonculées, longues de 6 - 10 cm. ; calice d'un vert pâle, long de 4 - 5 cm., égalant presque la moitié ou les 2/3 de la corolle, à lobes lancéolés-aigus ; capsule grosse comme une noix, dressée, ovale, chargée d'aiguillons robustes.
Varie à fleurs, tiges et nervures des feuilles violacées (D. TATULA L.).
Décombres, cultures, sables des rivières, ça et là dans presque toute la Franco et en Corse.
— Presque toute l'Europe, l'Asie, l'Afrique, l'Amérique.
= Juillet-octobre.
- Plante vénéneuse, préconisée contre l'asthme et les névralgies.
- Les fleurs des moissons ... - E. GADECEAU - 1914
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Noms communs: Pomme épineuse, Stramoine, Endormie, Herbe du diable, etc.
Allemandd: Stechapfel.
Anglais: Stramonium ferox.
Caractères: Grande herbe glabre, annuelle, à odeur vireuse, de 4 à 10 décim. Feuilles grandes, pétiolées, ovales-lancéolées, fortement sinuées-dentées. Fleurs blanches, en entonnoir, plissées, axillaires, solitaires, odorantes. Capsule dressée, ovoïde, de la grosseur d'une noix, couverte de forts aiguillons. Graines noires, réniformes. - Juillet-Septembre.
Aire géographique :
Parait originaire d'orient, aujourd'hui abondamment répandu dans toute l'Europe et sur un grand nombre de points du globe. Limité au nord par la Suède, il s'étend au sud jusqu'à Madère, les Barbades, l'ile Maurice, le Chili.
Propriétés :
Les graines de Stramoine conservent très longtemps leurs propriétés germinatives. De Candolle en cite de curieux exemples. On l'a vu sortir dans l'île d'Anglesay, en 1813, d'un terrain qui n'avait pas été remué depuis cen t ans.
Les graines ont causé plus d'un empoisonnement chez des enfants qui en avaient mangé. Cette plante a même défrayé certaines causes criminelles. L'extrait de Stramoine entre souvent dans la composition du fameux Haschich. Les feuilles sont employées en cigarettes contre l'asthme; elles font partie du Beaume tranquille.
Observations: Une espèce très voisine: le Datura Tatula L., que de Candolle croit originaire d'Amérique, ne diffère du D. Stranonium que par la tige plus robuste, violacée ainsi que les nervures des feuilles et la corolle. On la rencontre très rarement. Ce D. Tatula L. a été considéré par plusieurs auteurs comme une simple variété du D. Stranonium L. Cependant j'ai pu moi-même contrôler qu'il se reproduit exactement de graines pendant une très longue suite de générations avec tous ses caractères. De plus Baillon dit que beaucoup de médecins considèrent ce D. Tatula comme plus efficace que le D. Stramonium contre l'asthme. Tous ces faits, joints au pays d'origine différent, sembleraient prouver qu'il y a là deux espèces.
- Mouvelle Botanique médicale - M. A. A. MARESCHAL - 1876
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Etym. : D'après certains auteurs, le nom de Datura viendrait du persan TATULA, du radical TAL (piquer), par allusion à l'enveloppe épineuse du fruit.
Synonyme Vulgaire :
Pomme épineuse, Pomme de vallée, Pomme du Pérou, Pomme-du-Diable, Pomette, Herbe du diable, Herbe aux sorciers, Herbe des magiciens, Herbe à la taupe, Herbe des démoniaques, Chasse taupe, l'endormie, Jusquiame du Pérou, Estramon, Trompette du jugement, l'Endormeuse, Put-Put.
- PHYTOGRAPHIE MEDICALE - Joseph ROQUES - 1835
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Calice tubuleux, à cinq angles, à cinq divisions. Corolle très grande, infundibuliforme, à limbe campanulé, à cinq angles, à cinq plis et à cinq dents. Stigmate à deux lames. Capsule glabre ou hérissée , à quatre loges divisées par des cloisons, dont deux seulement atteignent le sommet. Semences réniformes; embryon presque circulaire, situé dans le milieu du périsperme.
DATURA STRAMOINE. DATURA STRAMONIUM.
Datura stramonium. LtNN. Spec. 255. DC. FI. Fr. 2688. Toua. FI. Toul. 92. CnEv. Fl. Par. 3. 501.
Ce pernicieux végétal , maintenant naturalisé dans toute l'Europe , a pris naissance en Amérique. Vaillant ne l'avait pas encore observé aux environs de Paris en 1722. On l'y rencontre aujourd'hui très-fréquemment dans les terrains sablonneux; il infeste les chemins et les champs qui avoisinent Auteuil, Le Point-du-Jour, etc. On le reconnaait aisément à sa tige herbacée , épaîsse, haute de deux à trois pieds ; à ses rameaux dichotomes , étalés, garnis de feuilles larges, pétiolées, ovales, anguleuses , et d'un vert foncé. Ses fleurs sont grandes, soutenues par des pédoncules dans la bifurcation des rameaux , ou latéralement près de l'aisselle des feuilles; elles ont une corolle en forme d'entonnoir, plissée, blanche ou violette. Le fruit est une capsule à quatre valves, arrondie, hérissée de fortes pointes. Les semences sont noirâtres, un peu rugueuses et comprimées.
Ce datura , désigné sous les noms vulgaires de pomme épineuse, d'herbe magique, d'herbe aux sorciers, etc., a particulièrement fixé l'attention des médecins et des toxicologistes. Toutes ses parties ont une saveur amère, et répandent une odeur fétide, virulente.
ANALYSE CHIMIQUE.
M. Brandes a obtenu des semences un alcali végétal composé, qui a reçu le nom de daturine. Cette substance est peu soluble dans l'eau et l'alcohol froids, mais elle se dissout dans l'alcohol bouillant, d'où elle se sépare, par le refroidissement , en flocons déliés qui n'ont point l'apparence cristalline; elle forme avec les acides des sels cristallisables.
D'après les recherches chimiques de MM. Geiger et Hesse , la daturine cristallise sans peine ; elle est très vénéneuse , et détermine une dilatation très-forte et persistante de la pupille. Elle se volatilise en partie sans altération, dégage de l'ammoniaque lorsqu'on la soumet à l'action d'une chaleur soutenue et des alcalis fixes. A la température ordinaire , il faut deux cent quatre-vingts parties d'eau pour dissoudre une partie de daturine , et soixante-douze seulement à la température de l'ébullition. Elle est très-soluble dans l'alcohol et un peu moins dans l'éther. Les sels de daturine cristallisent avec facilité et jouissent d'une action très vénéneuse.
M. Samuel Simes , qui a donné une analyse complète des semences de stramonium, y a reconnu l'existence de la daturine à l'état de malate, ainsi que M.Brandes l'avait observé le premier; mais il a vainement cherché la daturine dans les feuilles de cette plante. Il a reconnu d'ailleurs que la daturine était bien, ainsi que M. Brandes l'avait annoncé, le principe actif du stramonium, puisque quatre grains de son muriate ont donné en quelques heures la mort à un petit chat , après des nausées et des contractions dans les muscles des pattes et du cou.
PROPRIÉTÉS DÉLÉTÈRES.
Les capsules , les semences, les feuilles , les tiges , la racine, l'extrait aqueux de la plante, ont tour à tour produit l'empoisonnement. Toutefois les semences et la racine possèdent des propriétés délétères plus intenses. Pendant l'automne de 1817, je fus appelé à sept heures du soir dans la pension de M. Lemercier, rue des Martyrs, où huit élèves s'étaient empoisonnés avec les semences du datura stramoine. En arrivant, je trouvai ces malheureux enfans sans connaissance et dans une agitation continuelle ; ils avaient la face rouge, bouffie ; les yeux immobiles, hagards et saillans. Le pouls était petit, irrégulier; la respiration difficille. Quatre d'entre eux étaient dans un assoupissement carotique , bien qu'ils eussent abondamment vomi; les autres gesticulaient avec force et de mille manières, grinçaient des dents, et poussaient par intervalles quelques sons inarticulés.
Afin de mettre dans le traitement toute la méthode possible, et d'assurer en même temps la promptitude des secours, je confiai à un élève en pharmacie très intelligent , qui se trouvait dans la maison , les enfans dont l'état me paraissait moins grave, après lui avoir donné les instructions convenables.
Comme le vomissement avait eu lieu chez quelques-uns, et que la stupeur était le phénomène le plus intense , on leur fit boire alternativement de la limonade tartarisée et de l'oxycrat; on leur administra les mêmes liquides en lavement, et on excita la périphérie du corps par des frictions réitérées. Pendant que ce traitement était mis à exécution, on ne négligeait point les autres malades. On leur fit prendre de force de l'eau émétisée et des clystères laxatifs. Un de ces enfans, qui éprouvait une sorte de spasme sardonique, avec des crampes dans la région de l'estomac, fut soulagé par une potion huileuse éthérée. Tous les quatre eurent des évacuations : l'état convulsif se dissipa en partie, mais il survint une affection soporeuse profonde. On leur donna aussitôt des boissons acidulées , et on les frictionna vivement.
Cette méthode, bien simple, fut suivie pendant plusieurs heures avec une persévérance couronnée de succès : tous les élèves étaient dans un état rassurant, à l'exception d'un jeune Anglais, qui avait le corps couvert d'une sueur de glace ; il était dans un état de délire et d'assoupissement léthargique. Lorsqu'on l'agitait avec force, il ouvrait les yeux, mais il ne répondait point aux questions qu'on lui faisait; les objets environnans paraissaient troubler son imagination, et il retombait aussitôt dans la stupeur. Je prescrivis avant mon départ , qui eut lieu vers minuit, une potion composée d'eau de menthe, d'acétate d'ammoniaque et d'éther, et je recommandai d'insister sur les frictions rubéfiantes. Le lendemain, cet élève était également hors de danger.
Je dois ajouter ici que M. Lemercier et toutes les personnes attachées à sa maison montrèrent, dans cette fâcheuse circonstance, un zèle digne des plus grands éloges. La plante qui avait produit ce malheureux accident croissait en quantité dans le jardin de la maison. Les élèves avaient cueilli un certain nombre de capsuples et s'étaient partagé les semences, dont le goût est un peu sucré. J'aime à croire qu'on aura arraché ce dangereux poison. Les plantes vénéneuses, ainsi que nous l'avons déjà dit, ne devraient être cultivées que dans les jardins de pharmacie et de botanique.
Un homme âgé de vingt-huit ans, auparavant sain d'esprit et de corps, prend une forte dose d'un breuvage préparé avec les semences de stramoine. Il s'éveille en sursaut au milieu de la nuit, tient les propos les plus insensés, menace sa femme , ses enfans , demande des armes, s'agite comme un furieux, entonne des cantiques mêlés de chansons impies , et passe plusieurs jours dans un état complet de démence. On appelle des prêtres , des médecins ; rien ne peut le calmer ; plusieurs domestiques et plusieurs soldats vigoureux peuvent à peine le contenir. On le saigne; on lui donne une décoction d'anagallis nitrée; on lui applique des vésicatoires aux deux bras. Le troisième jour, il prend l'émétique, qui produit quelques vomissemens. Sa peau, était brûlante , ses artères battaient avec une force extrême; il faisait les plus horribles menaces, ne parlant que de meurtre et d'incendie. Le sixième jour, on lui fait une ample saignée; on supprime les vésicatoires; on donne de l'eau d'orge, des poudres avec le nitre et le camphre; on fait des onctions sédatives sur les tempes et sur le front. A l'aide de ce traitement plus rationnel, les symptômes s'amendent: le malade prend un peu de thériaque dans du vin; et, après une insomnie qui avait duré dix jours, il goûte un sommeil paisible. Le vingtième jour, il jouissait de toute sa raison. (Éphémér. nat. cur., ann. 3, page302.)
Il est inutile de faire ressortir toute l'absurdité de ce traitement incendiaire , du moins pendant les six premiers jours. Il aurait fallu combattre dès le commencement l'irritation excessive de tout le système par des saignées copieuses; l'émétique et les vésicttoires ne pouvaient, au contraire, que l'aggraver.
Sanvages raconte ( Nosologia methodica) qu'une bande de voleurs se servait de l'infusion des mêmes semences dans du vin, pour enivrer les voyageurs et les détrousser. Ce poison causait d'abord un prompt sommeil; mais, lorsqu'on se réveillait, on était fou, insensé ; on se livrait à mille extravagances; on ne parlait point ordinairement, mais on témoignait ses désirs par des gestes. Le malade n'éprouvait ni cardialgie, ni nausées : occupé de ses folies , il errait pendant plusieurs jours, et reprenait enfin l'usage de la raison; mais il était faible , il ne pouvait marcher, et il était inhabile à l'acte vénérien. Ceux qui avaient pris une grande quantité de ce breuvage délétère périssaient.
Ces faits ont été observés par les magistrats qui composaient le présidial de Montpellier, et par Sauvages lui-même.
Au rapport de Garidel ( Histoire des plantes de la Provence), le boureau d'Aix et sa femme, à qui des filous avaient fait prendre le même poison, devinrent maniaques et passèrent toute une nuit à danser en chemise dans le cimetière Saint-Sauveur.
Un enfant se promenant dans la campagne trouva une plante qu'il ne crut pas malfaisante; il en ouvrit les capsules , en tira quelques graines, les mit dans sa bouche , et les ayant trouvées de bon goût les avala. Sa mère, qui se trouvait avec lui, et qui était sujette à des accès de mélancolie maniaque, suivit son exemple , et mangea environ une cuillerée de ces semences.
Au bout de quelques instans, cette femme éprouva de continuelles envies de vomir, des étourdissemens , des maux de tête , des douleurs d'entrailles. Bientôt survint une sueur froide, suivie des signes d'une congestion vers le cerveau, d'une grande difficulté de parler, et de convulsions. On ne vit d'abord, dans tous ces symptômes, que le retour de l'ancienne maladie ; mais les accès de fureur augmentant progressivement, au point de lui faire mettre en pièces tout ce qui lui tombait sous la main, on jugea devoir recourir de nouveau au secours de la médecine, et M. Bernard fut appelé.
A son arrivée, il trouva cette malheureuse femme sans voix, et luttant pour s'arracher des bras des personnes qui la retenaient. Elle avait l'oeil hagard; son pouls, tendu, battait avec force ; ses membres étaient dans une agitation extraordinaire, et une sueur froide lui couvrait tout le corps;
Quelques graines de stramonium qui se trouvaient sur la table, et dont cette femme déclara avoir mangé, firent connaître la cause de son mal. Le médecin tacha d'abord, à l'aide de huit grains d'émétique dissous dans deux onces d'eau, et pris en trois fois, de quart d'heure en quart d'heure, de faire rejeter les semences , mais ce fut sans succès. Toutefois la malade s'endormit peu après.
L'enfant, qui avait également mangé de ces semences , mais en moindre quantité, était agité; il avait la fièvre et, par intervalles, vomissait des mucosités. Mais après avoir pris quelques grains d'émétique, il eut plusieurs évacuations, et les vomissemens cessèrent. Le lendemain matin, on trouva la mère sortie d'un profond sommeil qui avait duré toute la nuit sans interruption. Son égarement était toujours le même. Un second vomitif, qui lui fut administré, n'eut pas plus d'effet que le premier. La nuit suivante fut très-agitée. La malade évacua, avec de grandes douleurs, une matière infecte ; puis elle eut des sueurs abondantes pendant trente-six heures. Elle passa les jours suivans dans un grand abattement et sans connaissance. Le septième jour il s'opéra un changement favorable, et dès ce moment la malade se rétablit progressivement, et reprit l'usage de ses facultés intellectuelles plus complètement qu'avant son accident. ( ALLGEM,, etc. Extrait de la Gazette de Santé, année 1 824. )
Les feuilles desséchées à l'ombre et conservées avec soin sont également pourvues de propriétés vénéneuses. Des malfaiteurs, au commencement du siècle dernier, les réduisaient en poudre et les donnaient en guise de tabac pour accomplir leurs coupables desseins. Cette poudre , connue sous le nom de tabac de l'endormie, agissait comme soporifique et troublait les facultés mentales.
D'après les faits cités par Swaine, Vicat, Vandermonde, 1a décoction des capsules a produit des vertiges, la paralysie des membres, l'aphonie, un délire furieux. Ray, botaniste et physicien ang]ais, dit, dans son Histoire des plantes, que la racine de stramoine, infusée dans du vin , à la dose d'un gros, a causé la stupeur et l'assoupissement, avec des rêves fantastiques. M. le professeur Alibert ( Nouveaux élémens de thérapeutique ) parle de trois petites filles qui , après avoir mangé de la même racine, éprouvèrent les symptômes suivans: pendant la nuit, état d'agitation et de délire, loquacité, pouls très-fébrile, visage rouge et animé, yeux vifs et brillans , pupille fort dilatée, sentiment de prurit au nez. Les trois malades avaient des mouvemens convulsifs et parfois automatiques des extrémités supérieures et inférieures qui s'étendaient à tout le corps. L'une d'entre elles dansait, chantait , et ses lèvres exécutaient une succion continuelle. Selon d'autres auteurs, les tiges , les bourgeons, les feuilles. et l'extrait aqueux de 1a plante ont donné lieu à de semblables phénomènes.
MÉTHODE CURATIVE,
Les observations que nous venons de rapporter nous font assez connaître que la pomme-épineuse n'agit pas toujours de la même manière sur nos organes. Chez les uns, elle produit une sorte-d'ivresse, un délire extatique , un sommeil profond, la paralysie , le froid des extrémités, des faiblesses, des lipothymies, etc. ; d'autres éprouvent, par l'influence de ce poison, une anxiété douloureuse dans la région de l'estomac, une chaleur brûlante, la dilatation des pupilles , des spasmes musculaires , et quelquefois une surexcitation qui va jusqu'à la fureur.
Ces deux ordres de phénomènes exigent des remèdes différens ; mais, dans tons les cas , si le poison a été avalé depuis peu, il faut débuter par un vomitif, parce que l'observation a prouvé qne le vomissement dissipe quelquefois les accidens les plus graves. J'ai vu les crampes , les faiblesses , le plus violent délire, céder à l'usage de l'émétique. On oppose à l'état de stupeur et d'engourdissement l'emploi des acides végétaux, suffisamment étendus et administrés sous toutes les formes. L'assoupissement, la somnolence, la lenteur et la faiblesse du pouls, indiquent l'usage du café et des stimulans. Les congestions imminentes du cerveaux réclament surtout les déplétions sanguines, et il ne faut pas craindre de les réitérer lorsque les artères battent avec violence, et que le malade se livre à des actes de fureur. Les boissons adoucissautes, les huileux, les lavemens émolliens, sont utiles lorsqu'il faut calmer l'irritation de l'estomac , les douleurs abdominales, etc. Dans les cas d'une véritable asthénie , il faut donner des cordiaux , de l'éther et du vin vieux.
PROPRIETES MÉDICALES.
Toutes les foiS qu'il sera question d'apériences cliniques , faites de bonne foi et avec un admirable dévouement, il faudra citer celles de Storck sur les poisons. Avant lui on n'avait employé ni les feuilles ni les semences de la pomme-épineuse comme médicament. Après avoir avalé de petites doses du suc épaissi des feuilles, il en fit avantageusement l'essai dans plusieurs cas de manie, d'épilepsie, etc. Odhelius, Greding, Raioux , Hufeland et quelqµes autres praticiens ont continué les expériences de Storck avec des succès divers. Wedenberg, qui a disserté sur les effets de ce végétal , dit avoir triomphé de convulsions violentes en donnant tous les jours deux ou trois grains d'extrait, et en augmentant peu à peu les doses jusqu'à seize grains. Il y joignait l'usage des bains tièdes et quelquefois de la saignée. Les malades éprouvaient ordinairement la nuit des sueurs abondantes qui les soulageaient beaucoup, Lorsqu'il a voulu outrepasser ces doses, il est survenu des anxiétés suivies ,du trouble de la vue, d'une douleur gravative de la tête, etc. Conférez le deuxième volume de la collection des thèses de Baldinger : De stramonii usu in morbis convulsivis. Greding a souvent employé le même extrait dans plusieurs affections ,de l'appareil cérébral, en commençant par une petite Quantité, et ,en s'élevant ensuite à de fortes doses. Quelques malades ont été soulagés, d'autres ont souffert davantage ; un seul épileptique a obtenu une guérison parfaite. Bergius assure avoir guéri plusieurs maniaques en continuant ce remède avec persévérance; par le même moyen , il a dissipé cette espèce de délire qu'on observe chez les femmes en couche.
J'ai fait usage de ce poison dans quelques migraines invétérées et dans plusieurs cas de céphalalgie susorbitaire ; deux fois seulement j'ai obtelnu un soulagement momentané. De très-faibles doses d'extrait préparé avec les semences ont produit sur une dame très-irritabile, que feu le professeur Chaussier voyait avec moi une sécheresse de la gorge et des tremblemens qui ont duré plusieurs jours. J'ai été plus heureux dans une affection spasmodique qui se reproduisait à l'époque des règles avec une extrême violence.
Une femme, douée d'une imagination très-vive, éprouvait régulièrement tous les mois, pendant tout le cours du flux menstruel, une démangeaison horrible à la vulve, avec une irritation intérieure que rien ne pouvait apaiser. Plusieurs fois une sorte de délire érotique avait compliqué ces symptômes, et porté l'effroi dans la famille de cette dame. Après avoir employé vainement les bains, les boissons tempérantes, le petit-lait, les sédatifs ordinaires, j'eus recours à l'extrait de stramonium, dont la malade prit d'abord un grain matin et soir. Tous les trois ou quatre jours la dose fut augmentée d'un grain. Bien qu'au retour des règles il n'y eût presque pas de diminution dans les symptômes , la malade continuait cependant le remède avec confiance. Lorsqu'elle fut parvenue à la dose de dix grains , elle éprouva tout-à-coup une sorte de mobilité nerveuse, jointe à une gaîté insolite qui contrastait singulièrement avec l'air silencieux qu'elle affectait depuis plusieurs mois. Son esprit, d'ailleurs très-cultivé, se faisait remarquer par les saillies les plus vives , les plus piquantes. A la seconde époque des règles, elle prenait tous les jours quinze grains d'extrait. L'irritation extérieure et intérieure avait beaucoup diminué, et il ne survint aucun signe d'érotisme. L'espoir d'une guérison prochaine avait répandu dans l'esprit de la malade beaucoup de calme; elle me disait souvent: " Je croîs que mes folies vont bientôt finir." Plusieurs fois on fut obligé de diminuer les doses du remède, et d'avoir recours à la limonade, qui dissipait ordinairement d'une manière assez prompte l'aridité de la bouche et l'embarras de la tête. A la fin du troisième mois, cette dame était dans l'état le plus satisfaisant , n'éprouvant qu'une irritation très-légère. Pendant le quatrième mois, elle continua l'extrait de pomme-épineuse à la dose de huit grains seulement chaque jour ; elle prenait en même temps des bains tièdes et du lait d'amande. A la fin du cinquième mois , on cessa tout-àfait l'usage de l'extrait dont on avait d'ailleurs diminué progressivement les doses.
On a préconisé récemment comme un anodin efficace, dans quelques cas de goutte, l'extrait des semences de stramonium, qu'on préfère à celui de la plante, étant doué de propriétés plus sédatives. Toutes les fois que l'opium ne convient point par suite de l'idiosyncrasie du malade, le docteur Scudamore ( Traité de la goutte ) donne une préférence exclusive au stramonium sur tous les autres narcotiques. Il apaise surtout cette sorte de douleur qui dépend du spasme de la fibre musculaire , et il est très-propre à combattre la tendance aux crampes. On le donne à des doses variées, depuis un grain jusqu'à quatre, six grains et plus dans les vingt-quatre heures. Scudamore ajoute qu'il a obtenu des résultats plus décidés de l'extrait de stramonium mêlé avec le suc épaissi de la laitue vireuse. Cette manière d'administrer les substances narcotiques nous paraît un peu entachée d'empyrisme; cependant nous ne saurions blâmer l'usage des sédatifs lorsque la goutte s'empare d'un sujet nerveux , et se développe avec un caractère d'irritation qui résiste aux moyens ordinaires.
Le docteur Krimer a fait l'éloge de la fumée des feuilles et des tiges du datura stramonium dans les afections spasmodiques de la poitrine. Parmi les expériences pleines d'intérêt qu'il a consignées dans les Archives de méd.ecine des docteurs Horn, Nasse et Henke (juillet et août 1819), nous choisirons les faits suivans.
Madame B...., âgée de trente-trois ans, d'une belle constitution , consulta le docteur Krimer pour un serrement de poitrine des plus douloureux. L'examen le plus attentif ne pouvant faire soupçonner aucun vice organique, il jugea que la maladie ne provenait que d'une grande sensibilité des nerfs. Après avoir employé inutilement la valériane , le castoréum, etc. , il conseilla à la malade de fumer trois fois par jour des feuilles de stramoine. Une amélioration sensible ne tarda pas à avoir lieu ; la respiration devint plus aisée , la physionomie meilleure, et le moral plus tranquille. Enfin la toux cessa complètement, et toutes les traces de la maladie avaient disparu au bout de trois semaines. Depuis un an cette dame se porte bien et n'a point essuyé de rechute.
Un homme, âgé de quarante-deux ans, robuste et bien portant jusque là, éprouvait depuis deux mois une oppression et un serrement de poitrine avec imminence de suffocation; ces souffrances avaient lieu principalement le soir, et paraissaient dépendre d'une âffection purement nerveuse , dont le siége était dans les divisions capillaires des bronches. Le malade fuma toutes les deux heures une demi-pipe de feuilles et de tiges de stramonium. A peine eut-il cessé de fumer que l'étouffement et la toux diminuèrent considérablement. En fumant la première pipe, le malade se sentit comme étourdi; mais cet accident ne se reproduisit pas. Il continua de fumer ainsi quatre pipes par jour jusqu'au douzième. Le seizième jour, il cessa ce traitement comme entièrement débarrassé de ses souffrances. (Nouvelle Bibliothèque germanique, par MM. BREWER et HUET.)
Ce moyen , également recommandé par Hegewisch et Hufeland, ne doit être prescrit que dans les affections exemptes de phlogose, encore faut-il en surveiller l'emploi, puisque la seule vapeur des plantes narcotiques a souvent produit des accidens fâcheux.
Il est plusieurs manières d'administrer la pomme-épineuse. On se sert aux États-Unis du suc de la plante, à la dose de vingt à trente gouttes , dans le cas d'épilepsîe ou de manie sans fièvre. La poudre des feuilles sèches se prescrit à la dose de deux, quatre , six grains et plus; mais il faut observer attentivement l'effet que ces remèdes produisent. L'extrait de la plante et des semences exige les mêmes précautions : on commence ordinairement par un quart ou un tiers de grain, qu'on réitère deux ou trois fois par jour, et on augmente peu à peu les doses. Greding et quelques autres médecins en ont donné jusqu'à un demi-gros, tandis que Storck a eu des succès avec des doses bien moindres .
Hufeland a recommandé la teinture suivante: prenez, semences de datura stramoine une once, vin d'Espagne huit onces , esprit de vin une once. Faites digérer à une douce chaleur et filtrez. Cette teinture a quelque-fois prospéré dans le traitement de la manie, de la mélancolie, etc. ; la dose est de vingt gouttes et plus, qu'on répète suivant l'intensité de la maladie. C'est un sédatif souvent préférable à l'opium dans les affections spasmodiques, et surtout lorsqu'il s'agit de calmer les douleurs atroces causées par le cancer de l'utérus.
Teinture de stramonium de Zollickoffer. Prenez, semences de stramonium, une once; esprit de vin, demi-livre; faites macérer pendant sept jours; passez et conservez pour l'usage. Cette teinture a parfaitement réussi dans le rhumatisme chronique, à la dose de huit à onze gouttes matin et soir. Aussitôt que le malade éprouve de légers étourdissemens, on cesse le remède pendant quelques jours. Lorque l'usage intérieur de la teinture offre des inconvéniens , le docteur Zollickoffer emploie en friction sur la peau les deux préparations suivantes.
Teinture de feuilles de stramonium. Prenez, feuilles de stramonium, deux onces; esprit de vin, une livre; faites macérer pendant cinq jours, passez et ajoutez , huile de menthe pouliot , vingt grains; huile de cannelle, demi-gros; teinture d'opium, un gros; esprit de vin camphré, deux onces.
Pommade de stramonium. Prenez , feuilles de stramonium, deux onces ; axonge récente, quatre onces; cire blanche, une once ; faites cuire sur un feu doux, et conservez dans un vase de terre.
